lundi 31 décembre 2007

Orchestre Rouge

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J’ai déjà raconté que je voyais parfois un lien entre Red Crayola et Orchestre Rouge, une chose qu’il faut vraiment dire vite tellement elle peut paraître peu évidente et forcée. C’est la chanson Conspirator’s Oath extraite de l’album Soldier-Talk de Red Crayola qui me fait penser à cela -le début de cette chanson et sa fin aussi, pas du tout le milieu, trop ubuesque- parce que le chant maniéré de Mayo Thompson renvoie à ce qu’a fait Théo Hakola quelques années plus tard. Il y a une version terrifiante de Conspirator’s Oath sur le Live In Paris édité par Sordide Sentimental (excellent malgré un son très moyen) et j’imagine parfois que Theo Hakola a assisté à ce concert du Bataclan, ce qui est bien peu probable parce que je crois qu’il n’était pas encore arrivé en France à la date du 13 décembre 1978.
Mais je suis bien conscient que les comparaisons doivent s’arrêter là. Elles ont juste ce mérite de me remémorer les deux albums d’Orchestre Rouge : Yellow Laughter et More Passion Fodder, enfin réédités cette année par RCA/Sony. Le premier avait été produit (de manière inadéquate) par Martin Hannett qui cependant avait visiblement fait tout ce qu’il pouvait pour mettre en valeur des musiques inachevées et immatures. C’est le rôle de la mémoire que de faire le tri de façon parfois contestable et incomplète -dans cette situation c’est plutôt la mémoire qui me travaille- et j’ai été complètement dérouté par l’écoute de Yellow Laughter. La pauvreté de certains titres, en particulier Red Orange Blue qui marque le début du gros passage à vide de ce disque, pour moi n’existait tout simplement pas. On pardonne l’intro cliché de Soon Come Violence parce que juste derrière l’écoute de Je Cherche Une Drogue (Qui Ne Fait Pas Mal) et Soft Kiss est restée intacte. Speakerine est l’un des autres sommets de l’album, et peut être le seul moment avec Je Cherche Une Drogue (Qui Ne Fait Pas Mal) où la production de Martin Hannett est enfin justifiée… Le gros inconvénient de la réédition 2007 de Yellow Laughter en CD c’est aussi l’adjonction d’une face B de 45 tours, Kazettlers Zeks, qu’est ce que cette horreur sans nom fout là ?



















J’ai toujours été fasciné par la photo illustrant le premier album d’Orchestre Rouge -c’est mon côté kolkhozien, tout le monde n’a pas eu la chance d’avoir des parents staliniens reconvertis sur le tard à l’écologie et à la social-démocratie- une photo qui peut aussi évoquer la guerre d’Espagne (c’est même sûrement de ça dont il s’agit), l’une des passions de Théo Hakola sur laquelle il a beaucoup travaillé. Pourtant, l’illustration de More Passion Fodder est très importante elle aussi : elle marque la première collaboration entre Théo Hakola et l’artiste peintre Ricardo Mosner.
L’écoute de More Passion Fodder est beaucoup moins gênante que celle de Yellow Laughter alors que dans mon souvenir c’était tout l’inverse. Il y a bien ce son de guitare horripilant sur The Perfect Drunk, quelques choeurs pas très heureux mais il y a surtout -entre autres- Where Family Happens (Slow Death Kicking) qui est la première tentative de rapprochement avec le rock suintant du Gun Club. En général on peut même dire que, contrairement à son prédécesseur, More Passion Fodder ne souffre pas de réelle baisse de régime (mis à part Catholic Eyes ?). Même la nouvelle version de Red Orange Blue se révèle convaincante. Avec ce disque Théo Hakola pose les premiers véritables jalons de tout ce qu’il fera par la suite, à commencer par son groupe d’après, Passion Fodder (trois bons albums) et sa carrière en solo, qu’il poursuit encore aujourd'hui.