mardi 29 janvier 2008

Savage Republic & Overmars au Sonic

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Grosse attente en ce qui concerne le concert de ce dimanche soir : pour beaucoup Savage Republic représente -au choix- une légende vivante, une pièce de musée, un secret bien gardé, un ramassis de dangereux gauchistes californiens, un objet de curiosité… en fait c’est un peu tout cela à la fois, non ? Obéissant aux injonctions de l’organisateur, j’arrive sur le coup des huit heures pétantes, je me suis psychologiquement préparé à devoir faire la queue pour pouvoir rentrer dans la salle, à être éventuellement obligé de jouer des coudes, à râler que les concerts ce n’est vraiment plus ce que c’était et je me retrouve comme un con, tout seul ou presque, avec tout de même un autre psychorigide comme moi alors nous attendons tous les deux dans le froid à l’entrée de la salle et tels des vieilles commères qui se racontent leurs listes de courses respectives du matin au Monoprix nous papotons -ô surprise- de musique. Bien.
Il y aura une belle affluence ce soir là, environ cent cinquante personnes, mais ce ne sera pas non plus la folie annoncée, la salle n’est pas pleine, personne n’a été refusé à l’entrée, tout le monde ne s’est pas précipité des quatre coins du pays pour assister à cette unique date de Savage Republic en France. C’est une honte.






















Le premier groupe à jouer est très loin d’être un hors d’oeuvre puisqu’il s’agit des lyonnais d’Overmars qui clôturent ce soir un mini tour consacré à la parution (en octobre dernier) de leur disque Born Again. Paris, Londres, Bruxelles et maintenant Lyon. Je suis ravi de les revoir sur une scène aussi rapidement. La question que je me posais était : est-ce que les sept personnes d’Overmars vont réussir à tenir sur la minuscule scène du Sonic ? Celle-ci a été un peu rallongée avec des tables et chacun a sa place, le matériel imposant aussi, l’énorme ampli basse dans le fond, la batterie, le Korg devant à gauche. Tout y est. Parfait.
Malgré quelques approximations du son -mais, renseignements pris, celui-ci était bien plus net au milieu de la salle, notamment au niveau des voix toutes bien distinctes- le monstre Overmars réveille le côté obscur qui sommeille toujours en moi, leur down tempo ultra répétitif est diablement efficace, les guitares rugissent et forment un magma bouillonnant de noirceur. Le groupe a bien évidemment débuté avec sa longue pièce maîtresse Born Again, j’ai cette impression d’encore un peu plus de fluidité dans l’exécution de ce titre, je regrette simplement de ne pas pouvoir entendre correctement l’intervention au chant de la bassiste ni celles du vidéaste (?) dont pourtant j’aime beaucoup le timbre de voix. Comme d’habitude le chanteur principal tient le devant de la scène haut la main.
Une pause et ce dernier en profite pour glisser quelques propos au sujet du procès contre le Sonic et l’affichage libre, indiquant que la nouvelle audience au tribunal aura lieu jeudi prochain, le 31 janvier. La musique repart, le groupe se plante lamentablement et avec le sourire, ce n’est pas très grave, les rythmes lentement martelés d’Overmars reprennent rapidement le dessus, la machine redémarre et c’est l’occasion aussi de goûter au son de la basse, un son énorme qui dans le genre doit donner une certaine satisfaction lorsque on a trimbalé pour cela un ampli dont la taille tient plus du frigo qu’autre chose. Encore un titre est c’est fini, le chanteur d’Overmars annonce Savage Republic, merci pour eux.
















Les américains s’installent bien pépères, ils n’ont pas eu le temps de faire de balance mais cela ne semble pas les inquiéter. Greg Grunke est méconnaissable avec ses lunettes et son bide de Gepetto. Ethan Port s’est installé au niveau du sol devant la scène avec son bidon métallique, sa guitare et sa basse, il porte un magnifique t-shirt de Zoviet France, je ne savais même pas que cela pouvait exister. Je ne reconnais pas le batteur mais il joue sacrément bien et est doté d’un sourire colgate à faire péter les agrafes de soutiens-gorges. Aujourd’hui encore, je me demande toujours qu’elle est l’utilité du bassiste installé sur la gauche et qui passera l’intégralité du concert ou presque à gratouiller son instrument sur une corde et avec seulement deux doigts. Avant le concert il avait été spécifié au sonorisateur qu’il y aurait une main bass et une second bass : c’est en effet l’une des composantes du son de Savage Republic que d’avoir une basse très mélodique et sinueuse, mise en avant, un vieux truc post punk, mais pour ce qui est de l’autre, cette second bass, on ne l’a pas beaucoup entendue, qu’importe.
Pendant une bonne demi-heure Thom Furhmann joue lui au petit chef, dit à chacun ce qu’il doit faire ou non, interdit à l’occasion à Ethan Port de monter sur la scène -cela ne le rend pas très sympathique mais au fur et à mesure du concert il va apprendre à se détendre, fera des blagues, rigolera sans cesse avec le batteur désormais passé au stade émail diamant. Tous ces braves gens échangent allégrement leurs instruments et ce entre presque tous les titres, le bassiste prend une guitare, le guitariste prend une basse, etc. Malgré cette façon de faire le son du groupe ne varie pourtant pas et c’est vraiment étonnant.

















La set list comprend une très large majorité de vieux titres -de l’album 1938, Savage Republic ne jouera que quatre extraits, dont le très dispensable et très curiste Anemone- et c’est tant mieux. La surprise vient du côté décontracté du groupe, on est très loin des clichés sur la tension et la froideur des groupes de post punk 80’s. Malgré le tempérament de Fuhrmann, les quatre musiciens (j’exclue volontairement le deuxième bassiste qui de toutes façons ferme les yeux la moitié du temps) s’amusent, le son est là, celui de la guitare reconnaissable entre mille, les vieilleries d’anthologie aussi -Jamahiriya, Tabula Rasa, Mobilization, etc- et il y a ces flottements qui perturbent parfois le bon déroulement de l’exécution des titres, qui donnent un côté bancal et improvisé, processus en temps réel. Mais lorsque cela décolle c’est toujours pour de bon. Ethan Port fracasse régulièrement les oreilles de tout le monde en tapant sur son bidon, Grunke chante rarement mais visiblement avec conviction et plaisir, racontant, toujours aussi amusé après tant d’années, les mésaventures du groupe en 1988 avec la douane grecque (une histoire rabâchée que tout le monde connaît déjà et qui a donné naissance à l’album Customs) et Furhmann n’oublie pas le couplet politique en introduction du titre 1938 : ces choses qui malheureusement se répètent toujours.
C’est le moment du rappel et comble du bonheur Savage Republic entame une version explosive de Viva La Rock’n’Roll (d’Alternative TV) qui remporte tous les suffrages. Par contre ils massacrent consciencieusement Real Men avant de tout balancer dans un final percussif batterie/bidon fracassant, un dernier sourire ultra bright du batteur et le concert est terminé.