samedi 2 février 2008

Double Nelson / Pousser La Voiture

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Sur la pochette du Grand Cornet -peut être bien l’album de Double Nelson que je préfère- on voit cette drôle de caverne éclairée de l’intérieur, il se pourrait aussi que ce soit la bouche d’un poisson géant, et on n’a qu’une seule envie, c’est d’y pénétrer au plus vite, de quitter cet environnement extérieur tout noir, quitte à prendre le risque de croiser dedans ces drôles de bestioles qui foisonnent toujours dans les artworks du groupe, et ce depuis le début : reptiles trisomiques, mollusques enguirlandés, robots suceurs de cailloux. C’est qu’un disque de Double Nelson est toujours à la fois tordu, azimuté, d’apparence bordélique et en même temps on s’y sent bien, c’est accueillant, confortable, rigolo (ça donne même franchement envie de rire) et on se dit en fin de compte que toutes ces bestioles sont terriblement humaines, que le déviant est dans le droit chemin, que le mutant porte ses boutons purulents sur la gueule comme autant de signes d’intelligence, qu’il y a une façon de concevoir de la musique barrée sans tomber dans la chianteur, qu’il y a moyen d’être joyeux, en tout cas fantaisiste, sans passer pour un décérébré festif et que ce secret musical s’appelle Double Nelson. Avec Pousser La Voiture le duo en est -si j’ai bien compté- à son septième album, un disque enregistré par eux-mêmes pour tous ceux qui le veulent et distribué à la demande, il ne faut absolument pas hésiter, si ces deux là tardent à répondre c’est uniquement qu’ils sont très occupés ailleurs. C’est comme ça que j’ai pu jeter une oreille sur ce disque -en même temps que sur celui d’avant, The So Sorry Spaceman, The So Sick Spaceman And The Noisy Shadow VS. Double Nelson (2003) à côté duquel j’étais complètement passé.




















A l’intérieur du boitier il est écrit © 2006 mais le site du groupe annonce une parution datant de 2007… quoiqu’il en soit, Double Nelson sait prendre son temps -même si quelque chose me dit qu’ils n’ont pas eu trop le choix- et question musique Pousser La Voiture ne déroge pas à la règle de ses prédécesseurs : toujours ces basses aquatiques en apnée, les rythmes bricorigolos, du funk rachitique et indansable, des samples incroyables dont on n’est jamais sûr qu’ils n’ont pas été inventés de toutes pièces, de la guitare au son lyophilisé, des synthés en plastic, des textes dadaïstes, Love Me tender qui revient plusieurs fois sous différentes formes, des fourmis carbonisées, un son finalement inimitable mais reconnaissable entre tous, hors temps, hors norme, hors champs bien que terriblement incrusté par la réalité contemporaine -une sorte de croisement entre un Captain Beefheart anisé et je ne sais quel bande de bidouilleurs électronisés (pas DAT Politics, un truc beaucoup plus signifiant). Un disque élégamment foutraque et salement jouissif, encore une fois mille bravos.

[La page média du site de Double Nelson est plus que très fournie mais semble hors service à l’heure actuelle, dommage. Un peu de son ici.]