mardi 12 janvier 2010

Aidan Baker / Thoughtspan


Encore un prétendu nouveau disque d’Aidan Baker et encore une réédition. Thoughtspan était à l’origine un CDr trois titres gravé à cent cinquante exemplaires par le label allemand Tosom records en 2007. Aujourd’hui c’est un vinyl deux titres publié par Blackest Rainbow records à trois cent cinquante exemplaires. On frise carrément la surproduction. Mais on a perdu en route le premier titre du CDr, Speed Of Thought, qui se déniche par ailleurs très facilement au premier ramonage de tuyaux d’internet. L’intérêt de cette nouvelle édition ce n’est pas la nouvelle pochette ornée d’une photo déprimante et en noir et blanc de Leah Buckareff (la copine d’Aidan et son assistante/bassiste au sein de Nadja) mais bien de pouvoir écouter les deux titres restant - Thought Climate et Thoughtspan - sur un support digne de ce non.
Aidan Baker en solo est extrêmement versatile. On reconnaît forcément quelques uns de ses tics, son son de guitare, son amour pour l’éther, ses arpèges de cristal caramélisé, sa voix de Casper neurasthénique et son chant de Droopy sous valium mais d’un disque à l’autre on peut passer du folk tristounet voire complaisant (Scalpel) à du nappage electro et entêtant (I Fall Into You). Seul point commun : une certaine mollesse, à l’opposé de la lourdeur de Nadja mais rejoignant les aspirations du projet principal dans ce sentiment envahissant d’engourdissement et d’immobilité tournoyante.

















Selon ce critère, Thoughtspan se révèle être au dessus du lot, version hyper psychédélique et acide de Nadja (toute la première face et tout le final de la deuxième face) et délivrant ce qu’Aidan Baker sait faire de mieux : de la musique de hippie congelé par la mélancolie, comme si Nick Drake jouait à chat perché avec Ian Curtis dans le poulailler au fond du jardin de Mère Grand (You’re Not There, You’re Not There). Thought Climate, complètement instrumental, est la plus belle face de ce disque, toute en loops et manipulation de bandes, avec adjonction d’une trompette pour un résultat qui tarde délicieusement à prendre forme - en fait lorsque la batterie de Jonathan Demers se décide enfin à rythmer/canaliser (doucement) cette longue dégoulinade d’échos et de delays enchevêtrés sans réellement y arriver. La batterie est nettement moins convaincante et utile sur la deuxième face (l’éponyme Thoughtspan qui voit aussi l’adjonction d’un violon) qui se révèle toutefois plus incarnée malgré un démarrage à l’étrangeté appuyée. Aidan Baker confirme qu’il reste toujours ce magnifique faiseur de disques, cet artisan bricoleur en studio qui continue de (se) chercher et de trouver. Pourvu que ça dure.