lundi 22 mars 2010

Pord - Xnoybis / split























Voilà un bon petit single comme j’aimerais en écouter bien plus souvent. Vraiment. Un split single qui plus est, réunissant une paire de sacrés bons groupes dont on ne peut qu’espérer le meilleur dans un avenir proche. Le label Ocinatas Industries – qui semble encore arriver à organiser des concerts pour pas chers du côté de Paris – a vraiment bien fait les choses avec (j’imagine) les moyens limités du gugusse qui n’a pas envie de s’emmerder dans la vie, la musique avant tout, quoi. Pochette sobre mais soignée, la photo en noir et blanc* d’un cadavre encore tout frais ou plus probablement d’un pochetron qui au contraire ne l’est pas trop et une galette noire tournant en 33 rpm d’un côté et en 45 de l’autre. Un objet tout simple mais porteur d’une élégance pleine de promesses.

Et bien les promesses sont largement tenues. Sur la face 33 rpm on retrouve Xnoybis pour un long titre dépassant les six minutes, Picardian Fight Song – précisons que ces petits gars viennent d’Amiens. Un groupe dont le nom fait directement référence à Godflesh (Xnoybis est le premier titre de l’album Selfless de la bande à Broadrick, en 1994) voire à Giacinto Scelci et dont le Picardian Fight Song fait également penser, non sans quelques sourires amusés, à un célèbre titre de Charles Mingus.
Même si on a déjà écouté Solace, l’album que Xnoybis avait publié en complète autoproduction fin 2006, on ne peut guère augurer de la teneur de cette toute nouvelle composition alliant puissance et nervosité tant le groupe a réellement progressé depuis son premier disque, délaissant son côté trop ouvertement metal indus et pesant pour gagner en flexibilité tout en gardant cette lourdeur oppressante et poisseuse. Pensez Unsane mais pas que… les Dazzling Killmen ? Damned ! J’ai cru un instant que je m’étais trompé de face, qu’en fait j’écoutais Pord mais non, j’étais bien sur la face Xnoybis. Cette montée d’hormones est-elle due à l’arrivée entre temps de Baz derrière la batterie ? Le garçon a un jeu autrement plus intéressant et dynamique que son prédécesseur, il est vrai. Depuis l’enregistrement de Picardian Fight Song Xnoybis a à nouveau changé de line-up avec le départ du guitariste qui lui n’a pas été remplacé. C’est Ben, déjà bassiste et chanteur qui fait tout le bouleau (bon courage…) et le groupe continue, la suite est déjà attendue avec impatience.

Sur la face 45 rpm on retrouve donc Pord, groupe qui vient de l’un des coins les plus improbables de l’hexagone : la Lozère. Désolé les gars, on a déjà du vous la faire un milliard de fois mais un groupe de hardcore/prog metal comme le votre et originaire d’un tel endroit ressemble autant à une anomalie génétique qu’un groupe de power electronics du cantal ou qu’une fanfare free jazz creusoise.
Non content d’habiter dans l’une des plus belles campagnes de ce pays, Pord avait surpris tout le monde en délivrant en 2007 une démo cinq titres complètement hallucinante de rigueur torturée et d’envolées noise/hardcore sous totale influence Dazzling Killmen (on y revient). Je me mords encore les doigts d’avoir raté leur concert dans un bar pourri de Lyon il y a deux ans de cela mais je déteste les bars pourris, sauf ceux qui ont des tables en formica. A l’inverse de Xnoybis qui a su faire preuve d’une maturation certaine, Pord ne surprend pas, exploitant sur Joyeux Mimosa (c’est le split single des titres débiles) la même veine cauchemardesque que sur la démo et ne fait donc que confirmer – ce qui est déjà très bien. Là aussi, on aimerait une suite, un jour.

Entre Xnoybis et Pord on frôle l’excellence même si ce genre de formulation a tout du cliché bâtard. Mais oui, il est heureux de constater qu’il y a encore des groupes qui savent jouer violent, puissant et lourd sans avoir l’air de vils copieurs ou d’attardés mentaux. Single de ce début d’année. Un disque que l’on peut se procurer (en même temps que les enregistrements précédents des deux groupes) pour une somme dérisoire en allant faire un tour par ici. On peut également y télécharger Picardian Fight Song comme Joyeux Mimosa en intégralité.

* la photographe s’appelle Alexia et en a d’autres à proposer ici