jeudi 8 avril 2010

Hallux Valgus / Gale = Paranoïa + Psychose + Frustration























Gale = Paranoïa + Psychose + Frustration. Avec un titre d’album comme ça, il est certain qu’Hallux Valgus est presque aux portes d’une gloire naissante et plus que méritée. Mais ne nous emballons pas trop vite, la route est encore longue jusqu’au succès facile et les quelques commodités socio-économiques qui généralement l’accompagnent. Premier véritable enregistrement d’Hallux Valgus après une cassette huit titres de pauvres, ce Gale = Paranoïa + Psychose + Frustration est un LP monoface tout de noir et blanc vêtu, un objet à la présentation ultra sobre et arty tranchant avec son titre dégueulasse. Que croyez-vous donc qu’il y ait à l’intérieur ? De la pop retro-frigidaire ? Du néo-sixties ? Du post Etienne Dao ? L’énumération complète des références du dernier catalogue de papiers peints de Leroy-Merlin en guise de tentative de poésie sonore ? Bien mieux que tout ça : Gale = Paranoïa + Psychose + Frustration est le disque de punk noise qui nous manquait pour décorer les murs d’un début d’année un peu trop mollasson (après, il est vrai, une année 2009 particulièrement riche en émotions).
Hallux Valgus est un duo composé du guitariste de Death To Pigs et, à la batterie et à la voix, d’un homme-orchestre dont on n’a pas encore fini de parler par ici, plus connu sous le sobriquet de Sheik Anorak et jouant dans une kyrielle de groupes à n’en plus finir. Une association des plus fructueuses bien que trop sporadique à mon goût. Enregistrés à l’arrache au mois d’août dernier après une semaine d’intenses retrouvailles entre les deux compères, les neuf titres composant ce disque sont autant de glaviots gluants crachés à nos petites gueules. On a beau chercher un kleenex glissé comme goodies à l’intérieur de la pochette on n’en trouve aucun – oui, voilà, cette pochette me fait aussi penser à un sac à main, d’où la recherche désespérée d’un kleenex.
En guise de premier avertissement, Failed déploie ce riff caractéristique des maux de têtes qui vous collent à l’intérieur du crâne sans que l’on puisse les en déloger – encore l’effet glaviot – et lance une offensive en règle de larsens stridents et d’anti-mélodies fraiseuses/centrifugeuses d’une saleté et d’une crudité (cruauté ?) plus que bienvenues là aussi. Derrière ou plus exactement à côté, la batterie martèle ses rythmes dans ce style dépouillé mais carnassier immortalisé par des groupes de barges notoires tels que Arab On Radar. Les titres de Gale = Paranoïa + Psychose + Frustration défilent et on en prend vraiment pour notre compte avec ces salves aussi punk que noise, délibérément éjaculatoires et foutrement jubilatoires. Le degré d’intensité varie certes d’un titre à l’autre, passant de l’hystérie pure et simple (l’instrumental Pas Ici, Pas Maintenant) au relativement plus calme (le titre qui suit directement, Belt, et qui est la contribution légèrement pop à Gale = Paranoïa + Psychose + Frustration avec son chant presque acceptable par le bon goût). Parmi les meilleurs titres on remarque un My Own Pet et Frozen Bald Babies qui est le seul morceau à posséder une intro, une progression, un développement et une conclusion – n’ayez crainte, l’intro mise à part parce que presque atmosphérique, Frozen Bald Babies reste bien dans le ton de Gale = Paranoïa + Psychose + Frustration dont c’est un peu le morceau de bravoure et le climax. Une belle façon, chargée d’un peu plus d’élégance en tous les cas, de conclure. Mais l’élégance on s’en fout.