mercredi 8 septembre 2010

Grand Prédateur / self titled























Gros acte de contrition. J’ai beau rechercher et fouiller dans les moindres recoins de mon agenda de ministre, je ne trouve nulle part à la semaine 19 – comme on dit chez les gens très importants et très occupés – la trace d’un éventuel concert auquel j’aurais pu me rendre par ailleurs et qui expliquerait mon injustifiable absence du jeudi 13 mai 2010 à Grrrnd Zero pour assister à celui de John Makay et de Grand Predateur*. Rien. Cette semaine là, je n’ai absolument rien foutu. Je n’avais même pas à respecter le sacro-saint règlement intérieur qui stipule sans exception aucune que je n’ai l’autorisation d’assister qu’à un seul concert par semaine (les six autres jours je torche les gosses et je fais la vaisselle). Mais si je n’ai vraiment aucune excuse pour cette faute grave j’ai par contre plein de bonnes raisons d’aborder le sujet du disque de Grand Prédateur.
Je pensais à tort que ce duo originaire de Rouen n’était qu’un énième groupe de rock mathématique, comme c’est dûment indiqué sur leur monospace impérialiste. Les descriptifs sont souvent trompeurs, les chroniques de disques n’en parlons même pas, mais il n’est pas besoin d’avoir son brevet des collèges pour comprendre – dès les premières notes de Requin Blanc – que Grand Prédateur ne joue absolument pas du math rock. Ou alors non seulement ils ne savent pas compter mais en plus ils sont nuls en français. Pour ce qui est de la langue justement, cela tombe bien parce que le type qui braille des insanités derrière son micro fait tout pour que l’on n’y comprenne rien, c'est-à-dire exactement comme j’aime (l’autre voix se révèlera plus dans le registre canard défoncé à l’hélium, ce qui est tout aussi bien).
Dès lors la machine Grand Prédateur est lancée et le duo nous assène un diptyque Scott Kelly On A Horse/Over The Top qui résume à lui tout seul la musique de ce groupe et ce disque qui dès qu’il passe dans la boite à musique familiale transforme mon petit confort pépère en champ de foire (d’empoigne) dévasté par une tornade imprévisible. Ces deux là jouent vite et fort – et millimétré, malgré la bave et la sueur qu’ils répandent au sol, c’est sûrement pour ça qu’ils entendent être plus matheux que la moyenne – et ne laissent aucun répit. Les premières écoutes de ce 10 pouces sans titres sont ébouriffantes, les suivantes le sont tout autant bien que l’on ait entretemps saisi toutes les ficelles et tous les trucages de Grand Prédateur mais on s’en fout, le mal est fait et bien fait. Rien à en redire : les compositions courtes et incisives démontrent une parfaite maîtrise de la science du riff qui tue et du rythme qui tabasse**, le tout sur fond de gros son qui bave.
Et si rien ne remplacera un concert, on peut toujours se procurer cet excellent disque auprès des activistes suivants : Emergence records, Ocinatas Industries, Et Mon Cul C'est Du Tofu ? et même chez Arrache Toi Un Œil ! qui en plus a réalisé la sérigraphie de la pochette.

* d’un autre côté, depuis que j'ai lu que le concert lyonnais a été écourté, j’ai beaucoup moins de regret (une lecture intégrale du report montre que cette tournée de la mort n’a vraiment pas été facile)
** à défaut d’être mathématique le hardcore de Grand Prédateur est contrepètrique, remplaçant la liturgie du Stabat Mater par celle du Tabasse Ta Mère