lundi 6 septembre 2010

Oui, c'est la rentrée...
























Cette fois ci ça y est vraiment, les rues sont à nouveau blindées de voiture en stationnement, les bus dégueulent à nouveau de gens pressés ou blasés, les gosses sont retournés à l’école, leurs pleurs et leurs cris de joies se mêlent en une seule et même musique : celle de la rentrée de septembre, ce truc pour l’instant assez excitant pour eux puisqu’il est toujours synonyme de nouveautés et de changements mais qui risque de finir comme l’éternelle litanie des choses qui recommencent sans cesse, celle de l’ennui harassant.
Dès que je croise une tête pas vue depuis quelques semaines j’ai toujours cette conversion : « ça va ? ouais c’est la rentrée, quoi ». C’est la rentrée. Bien peu sont en mesure de me dire qu’ils ont fait un truc excitant – aller passer ses vacances dans un hôtel en Tunisie au bord d’une piscine pompant toute l’eau des nappes phréatiques dont les paysans du coin auraient pourtant bien besoin pour arroser leurs cultures vivrières ne fait pas partie des trucs excitants – et bien peu aussi ont des envies et des idées qui leur allument une petite lumière au fond du regard. Les gens ne sont même plus fatigués, résignés ou anesthésiés (tu veux une autre piqûre de politique sécuritaire dans le cul pour te faire passer le goût de la vie ?), les gens disparaissent. Ils disparaissent dans ce modèle de société qui ne cherche même plus à cacher ses atours totalitaires, sous un vernis démocratique. Friendly Fascism est le titre d’un album de Consolidated qui date déjà de 1991. Moi aussi j’ai décidé de disparaître, mais pas de la même façon : je ne suis pas retourné travailler au jour et à l’heure où j’aurais du le faire. Renoncer à son travail et à sa rémunération mensuelle n’a rien à voir avec le courage, la vie est juste ailleurs même si la vie demain risque d’être difficile et compliquée, pour d’autres raisons évidemment. On verra bien.

















C’est la rentrée et c’est surtout le premier concert de cette rentrée. J’y vais en courant à ce concert, pour une seule et bonne raison : écouter et voir de la musique en live me manque. Et puis revoir les amis du Sonic. La soirée va être chargée : l’association organisatrice a programmé quatre groupes ainsi qu’un mix pour la fin. Il y a déjà du monde lorsque j’arrive sur la péniche, la soirée s’annonce belle.
Les Blondettes sont les premiers à jouer. Contrairement à ce que le nom de groupe indique il n’y a qu’une seule fille dans le groupe et en plus elle est loin d’être peroxydée. J’ai la surprise de constater que le bassiste/guitariste du groupe est un garçon qui joue en solo sous le nom de Ludivine Cypher et qui organise régulièrement des concerts au Grrrnd Zero. Il vient d’arriver dans Les Blondettes, c’est son premier concert avec eux et je n’arrive pas à comprendre s’il remplace définitivement le bassiste qui jouait jusqu’ici avec le groupe ou si le future line-up sera de quatre membres.
Qu’importe, je suis très agréablement surpris par la musique de ces trois là, pourtant je n’ai pas particulièrement une âme de midinette mais la pop dynamique et virevoltante des Blondettes est séduisante. De la mélodie évidemment, des plans tordus subtilement glissés ça et là, une bonne rythmique et surtout une chanteuse/claviériste qui chante foutrement bien de sa voix aigue et exaltée des paroles en anglais et en espagnol qui ne semblent pas manquer de piquant. Presque malgré moi je me sens devenir son hijo de puta.
























C’est non sans une réelle curiosité et un plaisir non feint que j’assiste ensuite à mon premier concert de Raymonde Howard. Après avoir consulté mes tablettes je me suis aperçu que je l’ai déjà vue sur une scène avec l’un de ses groupes (La Seconda Volta) mais jamais toute seule. Ce soir elle joue sans son batteur mais cela me va aussi bien comme prise de contact. Je ne suis pas très objectif puisque son album For All The Bruises Black Eyes And Peas a longtemps figuré dans ma playlist mais j’ai aussi un peu peur, récalcitrant que je suis aux concerts unipersonnels de pop/folk. J’ai toujours peur de m’emmerder un peu, voilà le genre de musique que je préfère écouter seul et pas dans une salle de concert.
A l’aide de deux micros, d’une guitare, de petites percussions et bien sûr de sa loop station Raymonde Howard va passer en revue son album, nous gratifier d’une nouveauté (un titre réussi sur fond de beat électro) et même tenter l’inconcevable : une reprise du Ace Of Spades de Motörhead. C’est qu’elle a eu la curiosité d’aller écouter la musique de Purple Rhinestone Eagle – le dernier groupe qui jouera ce soir – et elle explique que cela lui a donné quelques idées/envies. Reprenant uniquement le gimmick à la guitare ultra célèbre de Fast Eddie Clark, chantant seulement le premier couplet (elle ne se souvenait pas vraiment des paroles originales pas qu’importe, vu la débilité de celles-ci) et tordant le refrain dans son style bien à elle.
Mais le plus beau reste ses propres compositions, des compositions d’une évidente simplicité et d’une vérité touchant toujours juste. Des plus entrainantes – The Raincoats Are Here – aux plus intimistes – Almost Go Unnoticed. Et une vraie belle voix. Et une présence assez incroyable. Incroyable cela veut dire que l’on ne sait pas à quoi ça tient mais que l’on s’en fout. Je crois aussi que Raymonde Howard est l’une des rares musiciennes qui me donne envie de m’intéresser aux paroles de ses chansons, chose que j’ai la mauvaise habitude de ne jamais faire.

















C’est le tour de Sida, groupe dont j’entends beaucoup parler actuellement. Je n’ai pas assisté aux concerts que le trio a donné ces derniers temps au Grrrnd Zero, concerts qui ont eu l’heur d’emballer quasiment tout le monde qui a pu s’y rendre, mis à part les habituels métallurgistes pyschorigides. La musique de Sida serait un croisement entre no wave et noise rehaussé d’un synthé cheap et surtout Sida ce serait un bordel punk aussi dynamique que jouissif. Les quelques extraits entendus et vidéos mal cadrées postées ça et là me laissent entendre que Sida est une sorte de Drunkdriver local, c'est-à-dire un groupe jouant à fond la carte de la saturation et du chaos. Ce qui n’est pas pour me déplaire.
Malheureusement je n’ai presque pas pu entendre une seule note du concert de Sida, la faute à un guitariste complètement à la ramasse jouant tellement fort que l’on entendait ni la batterie, ni le chant, ni le synthé. J’avais beau faire des efforts, je n’y arrivais pas et faire des efforts (autres que ceux de bouger son cul ou de headbanger comme un décérébré) lorsque on assiste à un concert c’est peine perdue. Ça veut juste dire que je n’aime pas ou que c’est mauvais. Des voix s’élèvent dans le public pour expliquer au garçon qu’il fait vraiment n’importe quoi, même l’un des deux boss du Sonic s’y met pour lui demander de baisser son ampli, les deux sondiers trépignent derrière la console car ils ne peuvent rien faire pour arranger les choses (en fait si : ils ont tout simplement coupé la guitare sur la table mais cela n’a fait aucune différence), mais le guitariste en question semble ne pas comprendre, continuant dans son trip et crucifiant son groupe sur place avec sa mélasse inaudible de six cordes. Il jouait sur l’ampli de la guitariste de Purple Rhinestone Eagle et ce jouet devait être trop gros pour lui. Un vrai gaspillage et un foutage de gueule tellement stupide et vain qu’il s’annulait tout seul, de lui-même. Si je veux écouter du harsh je préfère aller à un concert de Merzbow
Je le regrette car la chanteuse/claviers/guitariste a l’air d’avoir une sacrée personnalité – elle porte un t-shirt Birthday Party ce qui en soi ne veut pas dire grand-chose, même moi j’en ai un dans mon placard, mais surtout en fin de soirée elle mixera quelques disques, faisant preuve d’un goût aussi sûr que certain – et que le batteur est plutôt mignon avec ses frisettes blondes. Il me faudra donc revoir Sida dans d’autres conditions pour savoir ce que je pense d’un groupe jouant une musique dont je devrais a priori être client. En attendant je sors dehors (comme 90% de la grosse centaine de personnes composant le public) pour boire des bières. C’est toujours ça de gagné.

















Après ce concert merdique de Sida, n’importe quoi aurait pu convenir pour se refaire les dents. Purple Rhinestone Eagle n’est à proprement parler pas n’importe quoi mais un trio de filles jouant un heavy rock bien gras et orienté seventies. Ah ouais, dans ces cas là j’hésiterais presque à dire que ces trois filles jouaient à burnes un rock couillu mais c’était pourtant bien ça : des filles tatouées, poilues, transpirantes et furieuses, exactement comme je les aime.
Après nous avoir fait le coup du morceau speedé en ouverture, Purple Rhinestone Eagle a aligné des titres plus lents mais toujours très efficaces. Le son est énorme – dans le bon sens du terme – et dopé à la bigmuff. La batteuse a des arguments de poids, la bassiste tabasse comme une brute épaisse sa Rickenbacker noire (elle porte un épais bracelet en cuir pour protéger son avant-bras) et la guitariste prend le temps de quelques soli et idées qui assurent toute la fraîcheur et l’intérêt d’une musique qui sans ça risquerait de passer pour bien banale. Banale elle ne l’est donc pas.
En deuxième partie de set les Purple Rhinestone Eagle haussent le ton et le rythme et glissent d’un registre tendance Led Zeppelin/Black Sabbath à celui plus proche d’un Motörhead (nous y revoilà) tout en gardant la touche 70’s. Les filles s’excitent, les garçons font dans leurs culottes, le Sonic baigne dans la transpiration, une certaine idée du bonheur. Et je sens que je me transforme en chaudasse hystérique moi aussi. Sur disques Purple Rhinestone Eagle me semble nettement moins bon mais en concert le groupe à toute la générosité et l’énergie que l’on est en droit d’attendre d’un power trio basique. Ça défouraille velu et c’est le truc parfait pour passer un excellent moment en concert. Allez les filles !