jeudi 27 janvier 2011

Papaye / La Chaleur























Une précision très importante pour commencer : Papaye n’est absolument pas un groupe de math rock. Il y en a déjà qui rigolent face à une telle affirmation – car ils savent eux aussi que dans Papaye il y a un artificier échappé de Room 204, un mécanicien/conducteur de char habituellement employé chez Pneu et enfin un grenadier-torpilleur issu des rangs de Komandant Cobra – mais c’est pourtant l’exacte vérité. Papaye n’est absolument pas un groupe de math rock pas plus que Papaye est, malgré le pedigree catégorie haute voltige de ses trois membres, un supergroupe. Et ne me parlez pas non plus de side project, ce truc inventé par/pour les vieux rockers fatigués/en bout de course, pauvres pantins sans plus aucune idée neuve ni envie et talent pour continuer à faire de la musique comme lorsqu’ils avaient débuté, ceux-là même devenus beaucoup trop jaloux de la liberté des jazzmen voltigeant de session en session. Je veux bien admettre que ce line-up en ferait mouiller voire triquer plus d’un, qu’il réunit au moins deux musiciens particulièrement appréciés et que donc ça nous laisse quelque fol espoir d’entendre quelque chose d’incroyable, une musique à la hauteur de celle de Pneu ou de Room 204*. Papaye, fruit bien mûr, bien juteux et aussi appétissant que le mini-short rouge trônant au milieu de la pochette** du tout premier album du groupe, est bien mieux que ça : Papaye est un trio inventif, incisif, plein d’idées, et de sacrément bonnes en plus, et son disque, enregistré à l’ombre du studio de Miguel Constantino, s’intitule La Chaleur. Maintenant, tout le monde se met à poil.
Papaye joue donc du rock instrumental – le disque est fort logiquement sorti chez Africantape – mais un rock vif, concis, souvent puissant, jouissif parfois et un rock qui ose se perdre sans hésitation dans de drôles de méandres, de ceux qui te font gratter l’urticaire crânien en signe d’incompréhension alors que, espèce de gros bêta, il n’y a rien à comprendre. Papaye joue, tout simplement, avec spontanéité, un plaisir qui s’entend même au travers d’un enregistrement filtré par un vulgaire bout de plastique de douze centimètres de diamètre, un disque quoi. Et pas de tentation exotique non plus – sauf peut être ce dernier plan sur le dernier titre du disque, Megaplus. Papaye combine le basique et l’immédiat, le foisonnement des idées qui fusent de toutes parts et l’intelligence du jeu. Dès lors, effectivement, on ne peut plus parler de math rock car il n’y a aucune ostentation, aucune volonté avérée de péter plus haut que son cul, pas plus qu’il n’y a de calculs préétablis et de schémas volontairement trop construits. On sait que pour arriver à briller dans le genre il faut être, bizarrement, plutôt sacrément doué pour au contraire réussir à faire oublier que justement on l’est. Très peu y sont parvenu. Ou alors uniquement par erreur. Papaye n’a pas du tout besoin de ça. Le groupe sait aussi bien exposer un thème, fut-il très court, accélérer, ruer dans les brancards, dévier en sens contraire, noyer le poisson, vous servir le tout en salade de fruit mais Papaye ne raconte jamais de conneries pas plus que les trois musiciens ne s’en racontent à eux-mêmes.
La Chaleur
est déjà disponible depuis décembre 2010 et en vinyle du côté de chez Kythibong. Il ressortira également – en CD cette fois – chez Africantape en février 2011. C’est pourquoi ce disque, s’il a raté le classement dans le Top Of The Dope 2010, figurera très certainement dans celui de 2011. Papaye tourne en février aux côtés de Marvin et le groupe remettra ça en avril avec Oxes et Big’N (whammy !). Le trio sera bien évidemment présent le 30 avril prochain lors du premier Festival Africantape à Lyon/Grrrnd Zero.

* oui je dois avouer ici que je n’ai jamais réellement écouté Komandant Cobra…
** et la pochette de La Chaleur est une photo de Tom Bianchi – on ne clique sur le lien que si on a plus de 18 ans et que si les beaux mecs bronzés, trop musclés mais bien membrés et avec des petits culs serrés vous intéressent