vendredi 25 mai 2012

Café Flesh / Lions Will No Longer Be kings





Si je voulais jouer la carte de la provocation et du pugilat avec une volonté certaine et ferme de botter les culs de tous les pisse-froids qui avaient trouvé le troisième album de Café Flesh – le pourtant excellent I Dumped My Wife, I Killed My Dog – banalement rock’n’roll et poussivement beuglard, je rajouterais avec plaisir une bonne couche dans l’exagération à propos de ce nouvel enregistrement du groupe. Or le fait est que Lions Will No Longer Be Kings, l’enregistrement en question, ne saurait se passer de louanges autrement exaltées mais effectivement sincères. A l’attention de celles et ceux qui n’aimaient pas Café Flesh avant on concédera uniquement qu’effectivement Lions Will No Longer Be Kings est le meilleur disque du groupe à ce jour.
On l’a déjà dit plus d’une fois mais on le répète à nouveau, avec encore plus de force si nécessaire : CAFE FLESH est également l’un des meilleurs groupes de noise punk du coin. Comprenez que si ces quatre garçons n’étaient pas banalement moustachus et charentais mais magnifiquement tatoués et originaires de Minneapolis (Etats Unis d’Amérique) ou même d’Atlanta (idem), on parlerait sûrement un peu plus de Café Flesh et de ce superbe Lions Will No Longer Be Kings.
Bien sûr je les entends déjà les frileux qui rétorqueront que sans les groupes du label Amrep ayant sévi pendant les glorieuses – pour certains – années 90, Café Flesh ne serait pas grand-chose voire même rien du tout. Et oui, cela est sûrement très vrai. Ecoutez-moi donc ce bon gros son de basse (Lions Will No Longer Be Kings a été enregistré par Miguel Constantino et la qualité est au rendez-vous), un son bien épais et bien gras au service de lignes qui placent efficacement les dix compositions en position d’attaque.
Lions Will No Longer Be Kings est ainsi un vrai bonheur, un parfait moment de jouissance rock’n’roll et déjantée servi par un groupe au mieux de sa forme. On a parlé du bassiste qui c’est vrai prend beaucoup de place mais qui ne saurait pourtant faire ombrage au guitariste – tout seul à ce poste depuis deux albums – et chez qui les idées fusent, ni à ce batteur intraitable qui frappe fort. Mais celui qui en quelque sorte se taille la part du lion c’est le chanteur. Egalement saxophoniste (et auteur d’un magnifique et très sensible album solo intitulé Palais Des Enfants), ce garçon a trouvé le moyen de passer la vitesse supérieure – apparemment et contre toute attente il en restait encore une – et de s’époumoner toujours plus comme un beau diable.
Il est également responsable de la coloration particulière de la musique de Café Flesh puisqu’il ne cesse de la pimenter de ses judicieuses interventions au saxophone (baryton, alto ou soprano) et offre ainsi un solide pendant à la crasse naturelle et humide du groupe. On retiendra de Lions Will No Longer Be Kings des titres tels que ce Black Crow qui démarre comme une valse puis se paie le luxe d’attendre un peu, de sous-entendre l’accélération et le durcissement avant de foncer effectivement dans le tas – voilà un bel exemple, finalement, d’un effort de composition certain. Plutôt à part Zoo Went Crazy est lui un titre plutôt calme, très roots, jazzy, baloche et enfumé mais qui délivre peut-être le secret du noise punk sauce Café Flesh : quoiqu’il arrive le groupe ne se relâche jamais du côté du blues, du boogie et de la tradition mais sans volonté réactionnaire ni obscurantiste. Café Flesh c’est à la fois de l’élixir d’éternelle jeunesse et de l’eau de feu et le groupe en a trouvé le dosage parfait – c’est du 50/50, évidemment.

Lions Will No Longer Be Kings est publié sous la forme d’un beau LP (accompagné d’un CD au livret rachitique) par les labels Head records, Furne records et Smalltones records.