vendredi 11 mai 2012

Strings Of Consciousness / From Beyond Love






Sans trop que l’on sache d’abord trop pourquoi, il y a quelque chose de déroutant dès les premières écoutes de From Beyond Love, le nouvel album de Strings Of Consciousness – le premier depuis l’album collaboratif en compagnie d’Angel (Important records, 2009) et surtout le premier avec des invités au chant et à la voix depuis cette fabuleuse première tentative que constituait Our Moon Is Full (Central Control International, 2007). On reconnait le groupe protéiforme, on pourrait même dire collectiviste, emmené par Philippe Petit, Hervé Vincenti et Perceval Ballone mais des choses ont changé ou tout du moins attirent l’attention. La forme du disque déjà. Avec des titres parfois vraiment longs, à tel point que From Beyond Love n’en comporte que cinq. On peut même diviser l’album en deux parties : tout d'abord les quatre premières compositions, des compositions qui rappellent l’esprit et la démarche de Our Moon Is Full c'est-à-dire avec un invité au chant qui a également écrit le texte qu’il interprète ; la fin du disque est elle entièrement occupée par Hurt Is Where The Home Is, une longue déambulation de près de 20 minutes. On ne peut alors que se réjouir que Strings Of Consciousness n’ait pas bêtement copié/collé toutes ses façons de faire déjà utilisées sur Our Moon Is Full.
Pourtant rentrer dans ce nouvel album reste ardu. Est-ce la faute de la programmation et du son de la boite-à-rythmes* qui s’essaie à retrouver des structures propres au jazz, délaissant les structures trop binaires ? Non. Au contraire, on apprécie ce beau travail sur les rythmes, encore plus accompli que précédemment. Que reste-t-il donc ? Et bien je dois avouer que le choix des intervenants extérieurs me touche nettement moins. Our Moon Is Full n’accueillait que des belles voix masculines. Même si on retrouve Eugene Robinson sur Hurt Is Where The Home Is, le chant n’est pas réellement le point fort de From Beyond Love. Pourtant le casting est une nouvelle fois impressionnant mais rien n’y fait. Il y a des façons de chanter et des timbres de voix qui ne passent que difficilement voire même pas du tout.
Il en est ainsi de Julie Christmas (ex Made Out Of Babies et ex Battle Of Mice) qui apparait dès le premier titre, The Drone From Beyond Love, puis de Andria Degens** sur Sleepwalker. Cela fait déjà beaucoup mais Graham Lewis de Wire et Cosey Fanni Tutti (Throbbing Gristle, Chris & Cosey, etc) leur font suite et là c’est une toute autre affaire. L’un comme l’autre ont une façon de chanter fragile, faussement croonesque pour Lewis et presque fébrile pour Fanni Tutti, un chant sur le fil qui convient bien mieux aux ambiances electro/jazz/expé de Strings Of Consciousness. Bugged (avec Graham Lewis) est même le meilleur titre de toute la première partie de From Beyond Love, un titre enfin réellement émouvant – et rehaussé par la trompette d’Andy Diagram (des Spaceheads). Une fois que l’on a découvert Bugged puis Finzione (avec Cosey Fanni Tutti), on est rassurés sur le nouvel album Strings Of Consciousness et quelques retours en arrière permettent alors d’apprécier des détails qui nous avaient échappés sur The Drone From Beyond Love et Sleepwalker : le violoncelle d’Alison Chesley aka Helen Money par exemple ou la harpe de Raphaelle Rinaudo.
Reste Hurt Is Where The Home Is, titre inquiétant avec une Lydia Lunch toujours impérieuse (et en mode spoken words) et surtout un Eugene Robinson qui lui répond puis se retrouve tout seul à éructer, comme face à un mur. Hurt Is Where The Home Is est un titre complexe et claustrophobe mais qui justifie à lui tout seul que l’on s’attarde davantage sur From Beyond Love. Obscur et malade (ces petites notes de piano…) Hurt Is Where The Home Is a en effet tout de la « Murder Ballad » en mode industriel virant doucement vers le noisy avant de retomber dans un brouillard ambient et poisseux qui ne vaut guère mieux pour la tranquillité d’esprit de l’auditeur. On note la présence de Nicolas Dick de Kill The Thrill à la guitare et on s’émeut de ces sombres atmosphères alors qu’Eugene Robinson, une fois de plus, explose les détecteurs de frissons charnels. Avec Hurt Is Where The Home Is en guise de final, From Beyond Love, certes moins immédiat et plus obtus, gagne une place méritée aux côtés de Our Moon Is Full.

* je ne plaisante pas : les premières fois que j’ai écouté cet album, c’était via des mp3 et ces mp3 sonnaient horriblement à mes oreilles, surtout la boite à rythmes… c’est lorsque From Beyond Love est arrivé en version physique dans le salon d’écoute dernier cri de 666rpm que ce disque a enfin commencé à me plaire
** en ce qui me concerne une parfaite inconnue à ce jour mais depuis je sais qu’elle fait de la musique sous l’alias Pantaleimon et qu’elle a collaboré avec Dirty Trees ou Current 93