mercredi 24 octobre 2012

IRèNE / Nek





Si l’inventivité était une condition sine qua non et suffisante de la beauté, on pourrait affirmer que Nek, le premier véritable album d’IRèNE, est un petit chef d’œuvre de distinction et de grandeur. Seulement voilà, les quatre musiciens d’IRèNE ne se contentent pas de mettre leur imagination débordante et leur virtuosité certaine au service d’une musique aussi palpitante que saisissante ; ils utilisent également et à bon escient ces quelques armes dont beaucoup de musiciens de jazz ont trop souvent dédaigné l’usage et nié la pertinence tandis que les postulants au rock de stade tentent eux mais en vain d’en estomper les effets au profit d’une supposée rigueur, source de reconnaissance: l’énergie, la puissance, l’électricité… Ainsi Nek n’est pas qu’un disque qui puise une partie non négligeable de son inspiration ou tire ses racines dans le (free) jazz, l’improvisation, la freeture – appelez cela comme vous le voulez – et même parfois dans la musique contemporaine, Nek est surtout et avant tout un disque d’une vivacité et d’une générosité folle. La beauté sans condition, donc.
Car voilà également un disque finalement extrêmement varié, démarrant comme une tornade avec Bien Sûr, poursuivant sa lancée avec Sextet, un titre vraiment formidable avec son caractère de vieille horloge cliquetant au clair de lune ; un disque flirtant régulièrement avec le chaos, l’arythmie, le fracas de la guitare, les manipulations sonores (qui ne sont pas là que pour faire joli ou pour faire genre), la puissance mélodique mais aussi avec l’émotion (S et Choral, réellement poignants et définitivement superbes), la finesse, l’humour voire la drôlerie et qui, tout au long de ses onze compositions, arrive toujours à viser juste et surtout à nous toucher. On pourrait ainsi parler de pertinence musicale seulement voilà – encore une fois ! – IRèNE joue au contraire une musique impertinente, presque irrévérencieuse à certains moments, mais une musique qui également sait toujours retrouver la voie qui mène de la tradition (ce qui a pu être fait avant) vers ce que le groupe souhaite réellement, sa musique à lui, celle qui lui vient du ventre et qui, magiquement, s’accorde avec sa tête.
Nek est alors la démonstration, pleine d’humilité mais sûre d’elle-même, que l’on peut jouer une musique aussi magnifiquement imagée et très exigeante au niveau de l’écoute que totalement immédiate et inconditionnelle. Le secret de la spontanéité de Nek réside aussi sûrement dans la prise de son de Lucas Garnier, un garçon dont on a déjà pu apprécier la qualité du travail sur les récents albums de Lunatics Toys ou de Kouma ; un sens de l’ampleur électrique certain mais jamais au détriment des détails les plus insignifiants au départ mais finalement d’importance. Là aussi, tout est question d’équilibre et donc de clairvoyance.

IRèNe c’est, par ordre alphabétique : Sébastien Brun à la batterie, Julien Desprez à la guitare, Yoann Durant aux saxophones alto et soprano et Clément Edouard au sax alto et à l’électronique. Nek est publié en CD digipak par Carton records et le Collectif Coax.

Enfin, pour les lyonnais, sachez qu’IRèNE fêtera la sortie de Nek au Périscope ce jeudi 25 octobre.