vendredi 18 janvier 2013

Weasel Walter - Mary Halvorson - Peter Evans / Mechanical Malfunction




J’ai très longtemps fait partie des grincheux et des insatisfaits notoires qui se préparaient à regretter pour l’éternité l’abandon – définitif* ? – par le démoniaque WEASEL WALTER des voies de l’électricité explosive et du chaos final depuis la dissolution des irremplaçables Flying Luttenbachers. Mais aujourd’hui je dois bien avouer que continuer de pleurer sur la dépouille décomposée des Flying Luttenbachers est purement et simplement une perte de temps. Car le grand Weasel Walter, désormais entièrement dévoué à la cause de l’improvisation libre et de la freeture à toutes heures, a fait largement la preuve de tout son talent en la matière. D’autant plus qu’il sait très bien choisir ses partenaires : sur ce Mechanical Malfunction on retrouve, aux côtés du fantasque batteur, le géniale et brillant trompettiste PETER EVANS ainsi que la formidable et trop méconnue guitariste MARY HALVORSON.
Mechanical Malfunction n’est pourtant pas le premier enregistrement du trio – que l’on avait découvert en 2006 avec Mystery Meat chez ugEXPLODE, le propre label de Walter – mais il s’agit de très loin du meilleur, même si on pourra également conseiller son prédécesseur direct, le très jubilatoire Electric Fruit, publié lui chez Thirsty Ear. Peter Evans et Mary Halvorson jouent tout deux depuis quelques années avec Weasel Walter (la guitariste et le batteur ont aussi des enregistrements en duo, toujours et encore chez ugEXPLODE) et ce sont tous les deux des musiciens extrêmement fins et surtout très inventifs, capables d’une multitude de petits détails fourmillants comme de vrais coups d’éclat définitivement drolatiques voire impertinents.
Le jeu autrefois terriblement démesuré de Weasel Walter colle désormais parfaitement au langage et à la syntaxe des deux autres : le batteur développe toujours autant de puissance, il est toujours le roi intraitable et sans pitié du pilonnage intensif mais il joue sur un petit kit qui à l’image de la grosse caisse de petit diamètre attaque plus dans les médiums et dans les aigus. Résultat, ses frappes incessantes sonnent davantage comme des piqûres et des coups d’aiguillons que comme des explosions thermonucléaires. Walter utilise également des percussions annexes et des accessoires qui éclaircissent son jeu. On est donc très éloignés de cette époque bénie et fracassante, quand Weasel Walter avait pour unique devise « death metal is free jazz », enregistrait des disques bruyamment foutraques et donnait des concerts démentiels de violence mais on apprécie le côté extrêmement ludique et frais de Mechanical Malfunction, un disque qui (peut-être) pourra faire oublier aux détracteurs de l’improvisation libre et du free jazz le côté souvent trop cérébral de la chose (je l’admets).

[Mechanical Malfunction est publié en CD par Thirsty Ear]

* régulièrement des bruits de couloirs arrivent jusqu’aux oreilles des informateurs de 666rpm comme quoi les Flying Luttenbachers se reformeraient sous le meilleur line-up du groupe c'est-à-dire celui qui a enregistré l’album Cataclysm en 2006, donc Ed Rodriguez et Mick Barr aux guitares, Mike Green à la basse et Weasel Walter à la batterie… mais, honnêtement, je n’ose y croire : Weasel Walter a largement annoncé que les Flying Luttenbachers c’était bel et bien fini et voilà un homme qui change rarement d’avis