mercredi 20 février 2013

Report : Cyril M., Hama Yôko et Agathe Max au Sonic - 15/02/2013




La soirée commence mal : pendant que je rêvasse tranquillement sur mon vélo tout en conservant une vitesse moyenne digne d’un drogué du sport cycliste, un connard d’automobiliste arrivant en face de moi décide soudainement de tourner sur la gauche et donc de me couper la route – je freine brutalement et malgré cette manœuvre hardie qui ne manquait ni de panache ni d’aplomb je perds le contrôle de mon vélo de petit vieux, la roue arrière part en sucette, nous nous effondrons lamentablement ma machine et moi sur la chaussée humide et glissons avec toute la volupté d’une merdasse mécanique de l’époque préhistorique.
La voiture qui tournait a largement eu le temps de me passer devant au lieu de me passer dessus, j’imagine que le conducteur a du bien rigoler de me voir me vautrer ainsi par sa faute et – bien sûr – il ne s’est pas arrêté. En langage juridique certains appellent ça un refus de priorité et un délit de fuite. Mais tout va bien, n’est-ce-pas, puisque je me suis relevé sans peine et (presque) sans une égratignure ? Ben non. Les raclures de bidet qui conduisent comme si le monde leur appartenait et tentent de gagner des points de vie supplémentaires en se tapant les piétons, les vélos ou les autres bagnoles ça coure de plus en plus les rues, en ce moment, en ville. Bande de connards.



Cette colère à froid ne changera rien. Sur le moment j’étais surtout content de pouvoir continuer ma route après avoir remis en place la chaine de mon vélo et avoir enlevé un peu de la crasse urbaine que le côté gauche de mes vêtements avaient raclée sur le sol humide ; une insulte à l’encontre de la voiture déjà loin et puis c’est tout. Et continuer en direction du Sonic où une fois arrivé je termine de me nettoyer – je m’aperçois aussi que je me suis fais mal à la main gauche. Mais la soirée peut quand-même (vraiment) commencer.
Et elle commence par CYRIL M., charmant jeune guitariste/chanteur invité par Agathe Max – parce que ce soir c’est la release party de son nouvel album à elle et qu’elle a décidé de faire ce qu’elle veut –, un garçon de 20 ans qui ressemble à un Ramones (oui, je sais, j’ai des références de vieux con mais c’est de mon âge) mais qui tente plutôt de marcher sur les territoires sacrés du très grand Keiji Haino : guitare terroriste, chant maléfique de sirène éviscérée, destruction du blues et bidouillages bruitiste. Moi quand j’étais jeune j’ai toujours voulu ressembler à Lemmy Kilminster – et à un ou deux détails près c’est plutôt raté – et je comprends pourquoi Cyril M. a été invité par Agathe Max à ce concert : il y a du potentiel – et sûrement aussi du talent – chez ce jeune homme.
Je ne suis pourtant pas vraiment d’humeur mais, l’avantage de la jeunesse étant qu’elle va vite en besogne, le set de Cyril M. passe trop vite pour que j’aie envie de fuir en direction du bar pour commander une bière. Et puis si, tiens, finalement j’ai soif.




Suit HAMA YÔKO que j’ai déjà vue au Sonic (en première partie d’Aki Onda, de Cut Hands puis du duo Anne-James Chaton/Andy Moor) mais je ne m’en lasse pas. Là aussi le concert me parait bien court mais c’est sûrement parce que le charme opère une nouvelle fois complètement et qu’Hama Yôko est à sa façon une magicienne ensorceleuse. Sa pop mutante et détraquée est vraiment unique en son genre et si je faillis encore une fois à décrire de façon plus appropriée et à parler un peu mieux de la musique d’Hama Yôko c’est tout simplement parce que les termes choisis me paraissent toujours et au mieux inappropriés et au pire trop galvaudés.
On parlera (donc) de pop expérimentale, de bidouilles ludiques et de japonaiseries mais surtout Hama Yôko touche juste avec son lyrisme désaxé et ses perpétuelles trouvailles sonores. Une musique aussi vive, drôle que profonde et sombre. Sur la table de marchandising la chanteuse/musicienne propose son CD This Is Movie (publié par Nuun Eclipse) et cela me rappelle que je l’ai déjà, que je l’ai beaucoup écouté mais que je ne l’ai jamais chroniqué – oui, c’est mal.




Sur cette même table de marchandising il y a également des exemplaires de Dangerous Days, le nouvel album d’AGATHE MAX ; ce concert est précisément organisé pour la sortie officielle de ce deuxième album qui parait plus de trois ans après le premier, sur un tout nouveau label lyonnais, Inglorious records (et qui est également un nouveau studio d’enregistrement : c’est bon des fois de rencontrer des gens qui assument leurs rêves avec inconscience).
J’avais une longueur d’avance puisque ayant pu écouter les titres de Dangerous Days depuis quelques semaines déjà, confortablement installé à la maison devant mon ordinateur, mais quel plaisir de (re)découvrir enfin cet album en concert. Démarrant son set par Tundra et le terminant par The Bird, Agathe Max passe en revue toutes ses nouvelles compositions et en dévoile toutes les richesses : sa musique est désormais plus harmonique, moins tellurique mais elle n’en est pas moins porteuse d’une force de persuasion et émotionnelle qui vous enveloppe littéralement. Derrière le côté plus  apaisé il y a de fait une volonté étrange et assurée.
L’instrumentation est également plus variée – piano, orgue, batterie, etc – et Agathe Max gère ces nouveaux arrangements à l’aide d’un laptop sans donner l’impression de jouer avec des bandes : la performance instrumentale est toujours aussi impressionnante chez elle. Le recours aux projections ne donne pas non plus ce caractère de bouche trou (la musique d’Agathe Max pourrait pourtant être qualifiée de cinématographique) tout simplement parce que cette musique se suffit à elle-même, dans toute sa beauté et tout son pouvoir d’évocation. Encore un beau concert (et on reparle de ce nouvel album bientôt).

[quelques photos-souvenirs du concert]